Basics - La science de l'alaia, par Fred Compagnon et Rémi Arauzo

La glisse à l'état pur.

- @oceansurfreport -
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Une philosophie, deux histoires. Les prémices de la relation entre l'alaia et Fred Compagnon remontent à l'année 2008 sur le spot des Estagnots à Seignosse. "Je surfais avec une planche sans dérive, et j'ai aperçu Dave Rastovich sur un alaia." Les deux hommes discutent et échangent leurs supports. Quelques minutes plus tard, Fred file sur une vague. "Le feeling était dingue, le seul regret que j'avais était de ne pas avoir découvert ce type de planche avant." Pour Rémi Arauzo, il faut se rendre à 17 000 kilomètres de son Vieux-Boucau natal, dans le comté de Noosa, afin de retracer ses débuts sur la planche qui a vu le jour à Hawaï avant le  début du 20e siècle. "C'était au début des années 2000. J'étais allé en Australie pour une compétition de longboard et j'ai pu essayer un des premiers alaias de Tom Wegener." 

À force de se côtoyer et d'endosser les rôles de compagnons de cordée sur des expéditions aux quatre coins du monde, ils devaient finir par s'associer. 2008 marque les débuts de l'"autotao", un concept que Fred met au point seul. Au fil du temps et des sessions, le Basco-Landais perfectionne son système et le fait évoluer vers le "duotao", ce principe de glisse en alaia lancé en step-off via Stand Up Paddle manœuvré par une personne tierce. Accompagné d'abord d'Hugues Oyarzabal, puis d'Andoni Abaigar et d'Arnaud Darrigade, le Basco-Landais finit par faire équipe avec Rémi Arauzo en 2014. Depuis, c'est devenu leur marque de fabrique, à la Gravière et au-delà. De par leur expérience, leur maîtrise technique et leurs connaissances, nous leur avons demandé, point par point, ce qui fait les particularités techniques d'un alaia, du nose au tail. Que celles-ci concernent l'alaia classique ou l'alaia de "duotao". Car au fond, le principe est le même.

Le nose : "Il n'y a pas vraiment de spécificité. Mon but est de garder suffisamment de largeur pour que le planning (appui vertical sur la surface de l'eau) soit suffisant à l'avant et permette de ne pas planter", révèle Fred.

La longueur et le rocker : Selon Fred, une bon alaia est un alaia adapté à notre taille. De fait, contrairement à une board "standard" avec un rocker plus ou moins prononcé, la courbure d'un alaia est nulle, ce qui signifie que la planche est plate. "La conséquence de ce rocker nul, c'est la difficulté à faire basculer son poids de l'avant à l'arrière, et inversement." L'absence de courbe paralyse l'effet de balancier induit par les mouvements du corps et obstrue le principe d'inertie à l'entrée en vague. "Du coup, si le surfeur est mal engagé, il ratera la vague." Un effet d'autant plus notable si la planche est trop grande.

Laird Hamilton et Fred Compagnon.
La largeur : "Beaucoup de shapes d'alaia sont plus larges à l'arrière qu'à l'avant, ou à largeur équivalente. Je préfère avoir un nose un peu plus large, un wide point (la largeur au point le plus large d'une planche) plutôt haut et un tail plus étroit. Dans le cas contraire une fois debout, l'arrière de la planche veut pivoter et passer vers l'avant au moment du take-off", explique Fred. L'étroitesse du support permet également de réduire la surface en contact avec l'eau, de limiter les frottements et minimiser la perte d'énergie à partir d'une certaine vitesse.

L'épaisseur du rail : "En général, je suis entre 2cm et 2,4cm d'épaisseur pour un alaia classique. 1cm d'épaisseur pour un alaia de duotao. Globalement, les rails à l'avant de la planche sont relativement ronds pour qu'ils ne mordent pas, et plus incisifs sur l'arrière pour avoir une vraie accroche." Un choix qui possède un impact positif sur la pureté de la glisse selon Rémi Arauzo : "La planche est fine, on ne subit donc pas l'incidence des turbulences de la vague puisque les rails pénètrent et dans l'eau et tranchent la paroi de la vague. La ligne est donc très clean." Un aspect important qui influe également sur la rapidité du support lorsque les conditions s'y prêtent. Fred indique : "Comparé à une planche de surf, le fait que l'eau n'ait pas à parcourir toute la distance de l'épaisseur du rail réduit les frottements, et ce sur toute la longueur de la planche."

Dans la green room.
Le tail : Ce qui se prête le mieux pour l'alaia en duotao, c'est le fish tail, ou rond pour les vagues plus petites. "Ça joue beaucoup sur l'accroche", relève Rémi. Pour avoir essayé différentes configurations au niveau de la carène, Fred préfère jouer de simplicité : "J'ai testé des planches avec un concave simple, un concave double avec des channels prononcés. Mais je ne vois pas vraiment de différence. Depuis, je reste plat." Le tail est relativement étroit, pour faciliter le passage d'un rail à un autre.

Le but du jeu : "L'alaia de 'duotao' n'est pas une planche faite pour une vague de baïnes, ou une vague à manœuvres. Pour exploiter tout le potentiel de cette planche, il faut l'utiliser dans des vagues creuses", commente Rémi, qui considère ce support comme la planche ultime dans les tubes de la Gravière. "Tu as la possibilité de partir derrière le pic, et une fois lancé, la vitesse de ta ligne est supérieure à celle d'un surf. On passe des sections qu'on pourrait ne pas passer en shortboard par exemple."

 >> Lire ou relire : La science du Fish, par Alain Minvielle                 
Mots clés : alaia, fred compagnon, rémi arauzo, la gravière | Ce contenu a été lu 19653 fois.
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