Environnement - Madère : la vague A Esquerda da Padaria menacée

Si plusieurs vagues de l'île ont déjà été impactées par des projets de construction, aujourd'hui c'est au tour de celle de São Vicente.

- @oceansurfreport -
Flávio Nunes

Ce qui se passe à Madère en ce moment est loin de contredire l'alarmant nouveau rapport du GIEC paru hier qui confirme l'impact considérable voire irréversible que peuvent avoir les activités humaines sur la planète.

Une fois de plus, une vague de l'archipel est mise en danger. Ces dernières années, trois vagues de renommée mondiale ont été endommagées par des projets de constructions côtières. L'une d'elles, Jardim Do Mar, avait été désignée comme le meilleur pointbreak de grosses vagues de la planète. Malheureusement, la construction d'une route et d'un enrochement artificiel ne lui permettent de fonctionner dorénavant qu'à marée basse, et plus avec la même qualité. Malgré la mobilisation de la communauté de surfeurs à l'échelle internationale, le projet n'avait pas pu être contrarié. 

Aujourd'hui c'est au tour de la vague A Esquerda da Padaria, à São Vicente, sur la côte nord, d'être menacée.

São Vicente - Madère

Premier problème : le ressac

Les autorités locales désirent agrandir les infrastructures touristiques déjà existantes et construire un parking et une passerelle d'environ six mètres de large sur cette plage de galets. Or ce projet risque d'affecter la vague en provoquant probablement un ressac, c'est-à-dire un retour puissant de la vague après qu'elle ait frappé l'obstacle. Si la mer remonte suffisamment elle risque de heurter la structure, l'énergie créée par ricochet de la vague remontera jusqu'au line-up et détruira la prochaine vague. C'est déjà ce phénomène de backwash qui a endommagé une vague de ce type à Lugar de Baixo sur la côte sud de l'île portugaise.

Selon les promoteurs, la largeur de 20m de la plage empêcherait que cela se produise puisque la vague n'atteindrait pas l'obstacle. Cependant cette largeur est celle de la plage en période estivale. Lorsque les vagues sont petites et de courtes périodes, la plage à tendance à s'élargir. En revanche l'hiver, avec les tempêtes qui peuvent créer de grandes houles au nord et les vagues de grandes tailles à longues périodes, les sédiments se déplacent vers le large, ce qui a pour conséquence de rétrécir sa taille. C'est ce qui a été prouvé dans de nombreux cas sur différentes plages à travers le monde par les océanographes. La preuve en est, Valter Miranda, surfeur, ingénieur spécialiste de l'environnement et responsable de SOS - Salvem o Surf Madeira, a photographié la plage de São Vicente en hiver avec a une largeur inférieure à six mètres.

São Vicente, Madère


Second problème : l'érosion côtière

La construction de ces infrastructures pourraient également être à l'origine d'un second problème. En effet, cette structure risque d'exacerber l'érosion côtière. L'expérience montre qu'une construction fixe en béton au sein d'un système mobile comme une plage entraîne presque toujours une plus grande érosion que ce soit localement ou ailleurs sur la côte.

D'autant plus que, selon Valter Miranda, il est probable que l'entreprise choisisse d'utiliser des matériaux locaux pour des raisons économiques. Autrement dit, elle utiliserait les pierres de la plage elle-même pour son projet. Ce choix pourrait aggraver l'érosion de la côte déjà prévisible, car retirer une telle quantité de sédiments de la plage affaiblirait sa protection et la rendrait ainsi plus vulnérable aux tempêtes notamment.

À Madère où le tourisme représente l'un des moteurs économiques majeurs, ce projet se justifie par le volonté de proposer davantage de places de stationnement aux visiteurs dans une des villes les plus attractives de l'archipel. Valter Miranda propose, lui, une autre solution : "Il y a trois parkings à moins de trois minutes à pied, qui sont normalement vides : un à l'embouchure du fleuve, un autre au stade Juncos [stade de football] et un autre au Centro do Ouro [centre commercial]. Si les employés et les propriétaires des établissements commerciaux du front de mer de São Vicente garaient leurs voitures à ces endroits, cela libérerait du stationnement pour les visiteurs."

Encore une histoire de quatrième vague, mais qui cette fois-ci est menacée. Si vous souhaitez vous mobiliser aux côtés de SOS - Save Madeira Surf, une pétition est en ligne jusqu'au 13 août. Cette dernière est largement documentée, et on y retrouve notamment une étude sur l'impact environnemental du projet.

Par Flora Etienne

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