Océan Surf Report vous propose une nouvelle rubrique, OSR Région, qui mettra à l'honneur chaque mois une région différente, pour mettre en lumière tout son potentiel surf et ses originalités.
Nous démarrons l'aventure dans le Nord-Ouest, avec la Bretagne, terre de surf incontestable regorgeant de spots divers et variés. Tous les samedis, un article consacré à cette région sera publié, et ce durant tout le mois de décembre.
On savait déjà que la Bretagne était une terre de surf, dotée de nombreux spots exceptionnels. Ce que l'on savait moins, c'est qu'elle abritait également, en de rares occasions, des vagues solides de plus de 3 mètres.
Le surf de gros, c'est la spécialité de Ronan Chatain, coordinateur de la filière haut niveau à la Torche et professeur en école de surf. A 42 ans, ce Plomeurois d'origine compte bien continuer à vivre chaque jour sa passion. Connu pour surfer la vague de Basse Bouline, au large du Finistère, le surfeur est un des pionniers du surf de gros en Bretagne. Il a accepté de nous livrer quelques confidences sur ce secret bien gardé par les locaux : « Basse Bouline, c'est une vague qui est très rare, qui est exceptionnelle, exigeante, qui demande des conditions spécifiques pour fonctionner. Comme c'est une vague de pleine-eau, elle ne supporte pas le vent, et autant dire qu'en Bretagne, les jours glassy ou avec un très faible offshore en pleine mer, c'est juste extrêmement rare. C'est ce qui rend le truc rare et du coup précieux. »
Des moments précieux, il en a vécus depuis le jour où il a surfé pour la première fois cette vague, en février 2003 : « c'était la première fois que j'ai surfé ce spot. J'y suis allé en bateau à la rame avec un pote, mais c'était pas monstrueux, il y avait 3 mètres. Après ça, les grosses sessions qu'on a eu c'était entre 2007 et 2009, des sessions qu'on a partagées avec David Deanta, mon partenaire avec qui on a exploré toutes les roches du Finistère.»
Depuis 2003 donc, Ronan Chatain et David Deanta partent à la recherche des plus grosses vagues de Bretagne. Des sessions rares, que Ronan aime se remémorer : «On arrive dans un petit port pour mettre à l'eau le jet et le bateau avant le lever du jour, donc ça commence par une journée d'hiver glassy où tu vois le soleil se lever. C'est une ambiance très particulière, avec des couleurs assez incroyables. Comme on ne voit pas bien la vague du bord, il y a toujours une part d’adrénaline car on la découvre au fur et à mesure, et jusqu'au dernier moment, on a une surprise. »
D'autres spots de surf de gros existent en Bretagne. Selon Ronan, ce phénomène n'est pas anodin : « En Finistère, c'est une côte qui est très rocheuse et hyper découpée, par conséquent il y a des point, et du reef et cela offre un potentiel de surf important. Après, il faut les trouver, quand les conditions s'y prêtent. » Le Finistère serait donc la partie de la Bretagne où l'on a le plus de chances de rencontrer de grosses vagues.
Pourtant, malgré la présence de quelques spots qui peuvent marcher, le surf de gros en Bretagne est très peu médiatisé. Pour Ronan, c'est une question à double tranchant : « Je suis un peu partagé, parce que je pense qu'il y a certaines sessions qui méritent d'être mises en lumière et qui peuvent contribuer à légitimer la Bretagne comme une authentique terre de surf. Mais en même temps, je pense qu'aujourd'hui, c'est un luxe de pouvoir surfer des vagues consistantes, de qualité, sans être nombreux à l'eau. J'aurais plutôt tendance à dire que c'est bien que ça reste un peu dans l'ombre. C'est compliqué de tenir un double discours comme ça, mais pour avoir surfé un des premiers swells de la saison à Guéthary, j'ai juste été effrayé par le monde à l'eau et du coup par la dangerosité du spot au regard du nombre de personnes à l'eau. Ça devient un vrai problème. »
Ronan appelle donc à la plus grande prudence à l'eau et souligne la dangerosité du surf de grosses vagues. A propos de Basse Bouline, il émet quelques réserves: « Je ne veux pas particulièrement encourager les gens à y aller, parce que c'est un spot de pleine-eau, donc c'est dangereux, c'est loin, ça demande de la logistique, de la préparation, ce n'est pas un spot accessible. Je ne peux absolument pas encourager les gens à aller là-bas. Il faut comprendre qu'aller surfer des vagues en pleine-eau ça présente un vrai risque, donc il faut être capable d'analyser les conditions et de les évaluer au regard de son expérience et de son niveau de pratique.» Le surf de gros en Bretagne est donc la chasse-gardée de quelques locaux, fins connaisseurs et très expérimentés dans le domaine. La surprenante Bretagne garde donc tout son mystère puisque les spots de grosses vagues sont gardés secrets, pour préserver ces lieux mais également pour protéger les surfeurs intrépides mais mal préparés qui pourraient vouloir s'y aventurer.
La semaine prochaine, retrouvez notre article "Surfer l'hiver en Bretagne".
Crédit photos ©Sarah Van Garderen