Ce week-end, les côtes de Californie du sud ont connu une nouvelle marée noire dramatique. Alors qu'en juillet dernier l'état américain a connu l'incendie le plus dévastateur de son histoire - 190 000 hectares de territoire ont brûlé dans le nord de la Californie - c'est maintenant son littoral qui est victime d'une catastrophe environnementale majeure.
Samedi, 480 000 litres de pétrole se sont déversés dans l'océan, formant une nappe de 34 kilomètres carrés d'hydrocarbures au large d'Orange County, au sud de Los Angeles. Dimanche en fin de journée, la nappe continuait toujours de s'étendre. Ce déversement serait la conséquence d'une fuite apparue sur un oléoduc situé à une dizaine de kilomètres d'Orange County. La nappe s'étendrait ainsi d'Huntington Beach à Newport Beach.
Les conséquences de cette marée noire sur la faune et la flore ainsi que sur l'écosystème marin sont irréversibles. Des poissons et des oiseaux gisaient le long des côtes ce week-end, et des dauphins ont été aperçus nageant au milieu de la nappe pétrolière. C'est d'autant plus grave lorsque l'on sait que la côte californienne du sud abrite une biodiversité extrêmement dense. Le pétrole qui se dépose sur les ailes des oiseaux les empêche ensuite de voler ou de se nettoyer et les dauphins ou les baleines qui évoluent dans ces eaux polluées peuvent rencontrer des difficultés respiratoires susceptibles d'entraîner leur mort.
Selon Kim Carr, maire d'Huntington Beach (la zone la plus touchée) le pétrole est un véritable fléau qui ne cesse de prendre de l'importance. Il risque de toucher les "zones humides" et les réserves naturelles - essentielles à l'équilibre du territoire - comme le marais de Talbert. Ces zones assurent la protection de l'environnement local, notamment en contrôlant la pollution et en régulant les risques d'inondations. Elles sont aussi un lieu privilégié de reproduction pour beaucoup d'espèces animales et végétales. En certains endroits, le littoral est désormais recouvert de ces hydrocarbures.
Face à l'urgence de la situation, les garde-côtes américains se sont attelés au déploiement de barrages flottants visant à limiter la propagation du pétrole. Seulement 3% du pétrole a pu être contenu, ce qui explique que de nombreuses plages ont déjà été touchées. Toutes les plages d'Huntington ainsi que Laguna Beach ont été fermées sur plus de vingt kilomètres, et la pêche y est désormais interdite. L'interdiction d'accès au littoral pourrait durer des semaines voire des mois selon la municipalité locale. Des habitants de la zone se sont déjà plaints d'une très forte odeur de bitume présente dans l'air. À ce propos, les autorités sanitaires ont encouragé les personnes ayant inhalé ces vapeurs à consulter un médecin.
La plateforme pétrolière d'où provient la fuite serait exploitée par Beta Offshore, une filiale californienne du groupe Emplify Energy Corporation basé à Houston. Le groupe d'exploitation pétrolière a décidé de mettre à l'arrêt l'ensemble de ses sites dans la région. De son côté, la maire d'Huntington Beach attend de lui qu'il mette tout en oeuvre pour remédier, dans la mesure du possible, à ce désastre écologique.
Point positif, s'il est possible de parler ainsi, cet événement a permis de relancer les débats déjà existants autour des installations d'exploitation pétrolière et des oléoducs présents en grand nombre le long des côtes californiennes. Depuis les années 1940, des oléoducs ont été installés dans les eaux fédérales sur plus de 60 000 kilomètres. La plateforme d'où se sont échappés les 480 000 litres de pétrole avait été construite en 1980 et plusieurs militants écologistes avaient levé l'alerte sur les dangers que pouvaient représenter ces installations vieilles de plus de 40 ans.
À la toute fin des années 1960, une catastrophe similaire avait déjà eu lieu en Californie. Cette année-là les États-Unis ont connu la plus grosse marée noire de leur histoire. Une plateforme exploitée par la compagnie Union Oil avait explosé et 16 millions de litres de pétrole s'étaient déversés au large de Santa Barbara. Traumatisé par cet épisode, qui a entraîné la formation de plusieurs mouvements écologistes et militants, l'Etat californien avait pris la décision de ne plus autoriser les exploitations pétrolières off-shore. Malheureusement, son autorité se limite à sa juridiction, soit à 5 kilomètres des côtes. Au-delà de cette zone ce sont les autorités fédérales qui décident, ce qui explique la présence de vingt trois plateformes d'exploitation pétrolières au large de la Californie.
L'ancienneté de ces installations pourrait faire de ce désastre écologique le premier d'une longue liste, même si d'autres l'ont précédé, dont les conséquences seraient encore plus néfastes pour les régions littorales californiennes.
Par Ondine Wislez Pons
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