WCT - Chroniques du Pipe Masters : Miky Picon, nom d'une Pipe !

"Toute la plage a crié, et quand le speaker a annoncé les scores, c'était un des meilleurs moments de ma carrière." - Miky Picon

- @oceansurfreport -
Chaque mercredi avant le début du Billabong Pipe Masters, qui prendra ses quartiers sur le North Shore d'Oahu du 8 au 20 décembre 2019, Surf Report vous propose de remonter le temps afin de revenir sur les instants qui ont forgé l'histoire de la mythique épreuve hawaïenne. Cette semaine : le jour où Miky Picon a signé le meilleur heat de sa carrière.


À en croire certains, un seul drop sur le North Shore peut permettre d'accéder à une notoriété internationale. À en croire tout le monde, en fait. Miky Picon le premier : "Il suffit que tu prennes le tube de l'hiver et c'est joué", racontait le Landais dans le N°271 de Surf Session, qui compare l'origine de la consécration à Hawaii à un jeu de hasard. "C'est un peu comme participer au loto. Si tu fais quelque chose de fort ici, même une seule manœuvre, tu peux marquer les esprits."

Chaque surfeur professionnel entretient une relation particulière avec l'archipel mythique du surf. Le Seven Mile Miracle est un pèlerinage. Et en tant que Landais et souverain des tubes de la Gravière, Miky Picon a forcément développé une affinité particulière avec les vagues qui peuplent le nord d'Oahu. Réaliser une performance ici, il en a fait une affaire personnelle"Faire une belle série à Hawaii, c'est synonyme de gain de respect, de reconnaissance", avouera-t-il neuf ans plus tard au micro d'Impact Zone Surf Podcast

En décembre 2009, Miky a touché le gros lot. Pour sa deuxième année sur le Championship Tour, une saison après sa toute première qualification dans l'élite, le fer de lance de l'Euroforce a pourtant peiné à s'exprimer tout au long de l'année et les seconds tours se sont toujours révélés être un barrage infranchissable. Mais s'il y a bien une étape qui permet de redistribuer les cartes, c'est le Pipe Masters.

Le premier tour de l'édition qui couronnera l'Australien Taj Burrow l'oppose au "Prince de Teahupo'o", Manoa Drollet. Le finaliste du Billabong Pro Tahiti 2008 essaye de rivaliser, mais en vain, et le natif de Casablanca file vers le 2e round. C'est là qu'intervient l'exploit. "Toutes les conditions étaient réunies : le matos, les conditions et l'entourage", relate Miky. "Mais Josh était vraiment très fort cet hiver-là." Josh, c'est Josh Kerr, celui qui a prouvé maintes fois l'étendue de ses talents sur le North Shore, et qui endosse alors le rôle de concurrent direct du seul Français sur le Championship Tour pour le second tour du Pipe Masters.

Le matin, un swell consistant conférait toute sa puissance à la vague mutante d'Oahu. Mais ce dernier est tombé en début d'après-midi, rendant l'option "Backdoor" plus favorable. Miky l'a bien compris. "Je voulais faire l'impasse sur Pipe pour ne pas me divertir et rester concentré sur Backdoor", lâchera-t-il après coup. "Je suis rentré dans l'eau la tête vidée en me disant : 'Tu fais comme à la maison, tu ne réfléchis pas trop, et pense que tu es à la Piste.'" C'est aucun doute cet état d'esprit qui permet à l'Aquitain d'afficher une telle aisance dans un terrain de jeu si exigeant. Le Français se met en mode automatique, assurant son placement pour prendre les bombes. Sa technique et son choix de planche, plus grande et plus épaisse que celles des autres surfeurs à Pipe, feront le reste.

"Les deux vagues où je suis parti, je pensais être trop deep et une fois au bottom, je me suis dit : 'Ça va être vraiment chaud.' J'ai tout fait pour garder la bonne ligne, et quand j'ai senti que ça soufflait derrière et que j'étais encore là, c'était une sensation incroyable. Toute la plage a crié, et quand le speaker a annoncé les scores, c'était un des meilleurs moments de ma carrière." Car ces scores sont sans équivoques : 9,83pts et 9,93pts (soit un score total de 19.76pts pour les moins habiles en maths). Un résultat final qui frôle la perfection et barre la route de Josh Kerr. Net et sans bavure.

Dans un contexte de non-requalification pour la caravane du Tour l'année suivante, cette série vient largement remonter le moral de Miky, même si, plus tard, il s'inclinera d'un rien au 3e tour face à Tom Whitaker. Et surtout, elle lui permet de gagner le respect de ses pairs : "Le soir, j'ai mangé à la maison Billabong avec Andy Irons, Joel Parkinson... Ils m'ont tous félicité. Kelly m'a envoyé un message, Rob Machado aussi, j'avais l'impression d'avoir remporté la compétition !", a-t-il confié à Impact Zone. À lui seul, Miky a donc prouvé que les surfeurs français avaient clairement des choses à prouver sur le North Shore, huit ans après la demi-finale de Didier Piter à Pipe. Sans savoir qu'un an plus tard, Jérémy Florès remporterait l'épreuve ultime du circuit international...

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